«Pourquoi ne pratiques-tu pas un sport moins agressif comme la ringuette ou le patinage artistique?» «Tu te débrouilles plutôt bien pour une fille.» «Est-ce que c’est vrai que toutes les joueuses de hockey sont lesbiennes?» Ces phrases, Zoé Philbert (B.A. communication, 2018) les a entendues à maintes reprises entre le primaire et le cégep, alors qu’elle jouait dans une ligue de hockey organisée. «Les commentaires provenaient autant de connaissances, de camarades de classe ou de membres de ma famille, de filles que de garçons, de jeunes que de moins jeunes, affirme l’étudiante à la maîtrise en communication. On remettait constamment en question le choix du sport que j’aimais.»
À ces stéréotypes sur les hockeyeuses s’ajoutent les inégalités flagrantes vécues par les athlètes professionnelles. Sidney Crosby, le joueur de hockey le plus célèbre au monde, touche un salaire annuel frôlant les 10 millions de dollars. Marie-Philip Poulin, surnommée la «Sidney Crosby du hockey féminin», gagnait l’an dernier 1000 fois moins que son homologue masculin, soit à peine 10 000 dollars! «Quand j’assiste à un match de hockey féminin, je suis toujours étonnée de constater que le prix d’entrée est moins cher que le prix de deux hot-dogs pour un match des Canadiens», mentionne Zoé Philbert.
Lors de son parcours, l’étudiante a elle-même vécu son lot d’inégalités. «Au cégep, le budget consacré au hockey masculin était beaucoup plus élevé, dit-elle. Alors que les garçons voyageaient dans un autobus payé par l’institution, nous devions souvent assumer nous-mêmes nos frais de transport. C’était la même chose pour les repas, l’équipement et les vêtements.»
Dans tous les sports
Zoé Philbert constate que le sexisme à l’endroit des sportives ne se limite pas au hockey. «Au bac, j’ai fait un travail de session sur les représentations des athlètes féminines dans les médias durant les Jeux olympiques de Rio. J’ai recensé un nombre impressionnant d’articles de journaux, tant au Canada qu’à l’international, qui parlaient de l’apparence physique des athlètes féminines plutôt que de leur performance.»
Pour son mémoire de maîtrise, Zoé Philbert réalisera des entrevues avec des athlètes professionnelles afin de dresser un portrait de leurs expériences positives ou négatives, tant dans leur sport que dans leur vie en général. «Je veux savoir comment elles parviennent à concilier sport, travail et famille, souligne l’étudiante. Je veux aussi comprendre pourquoi elles continuent à pratiquer leur sport favori en dépit des contraintes. Outre la passion, y a-t-il d’autres facteurs qui les incitent à persévérer?» En plus des hockeyeuses, Zoé Philbert aimerait recueillir les points de vue d’autres sportives non traditionnelles: boxeuses ou lutteuses, par exemple.
Trouver des volontaires pour sa recherche ne devrait pas poser de problème pour celle qui a joué trois années au niveau collégial. Les deux sœurs de Zoé Philbert font partie des Stingers de l’Université Concordia, dirigées par Julie Chu et Caroline Ouellette, deux anciennes joueuses professionnelles. «J’ai aussi de bons contacts à l’Institut national du Sport du Québec», mentionne l’étudiante.
Un programme stimulant
Inscrite à la concentration recherche générale de la maîtrise en communication, Zoé Philbert a choisi de poursuivre ses études sous les conseils de sa grand-mère, elle-même diplômée de la maîtrise en sociologie. «Je ne regrette aucunement ma décision, dit-elle. L’environnement à la maîtrise est formidable: les cours sont vraiment intéressants, les échanges sont stimulants et les profs sont compétents.»
La recherche de Zoé Philbert est encadrée par Véronique Leduc, professeure au Département de communication sociale et publique. «Véronique m’offre beaucoup de soutien. Elle m’aide à identifier des théories et des auteurs, me propose de nouvelles avenues et me fait sortir de ma zone de confort. Elle essaie aussi de m’intégrer à la communauté de recherche en me suggérant des colloques ou des groupes de recherche.»
L’étudiante, qui a terminé sa scolarité mais qui en est au début de son parcours de recherche, compte déposer son projet de mémoire à l’automne. Si tout va bien, elle aimerait terminer sa maîtrise à la fin de 2021. «Je ne pense pas que mon mémoire va changer le monde, dit-elle. Mais si je peux amener ne serait-ce qu’une jeune fille à assumer son choix de sport et à avoir confiance en elle, je pourrai dire mission accomplie.»
Source :
Service des communications
UQAM, 3 mars 2020
Toutes les actualités de l'Université du Québec à Montréal >>>