Dans un texte intitulé Un mot, son histoire et la liberté d’enseignement, publié le 28 octobre 2020 dans les pages Devoir, le professeur émérite et sociologue de l’UQO, Yao Assogba, souligne que dans chaque communauté humaine il y a des mots qui ont une histoire chargée de blessures collectives.
Réagissant à la récente controverse qui a secoué l’Université d’Ottawa et entraîné un débat dans plusieurs sphères de la société, le professeur Assogba écrit : Il est entendu que dans les sociétés démocratiques, l’université est un lieu de haut savoir où la liberté de l’enseignement est garantie et sa remise en cause doit être combattue sans cesse afin qu’un tel privilège collectif soit jalousement préservé. Dès lors, nous nous devons de condamner avec vigueur les cyberintimidations et les menaces à l’intégrité psychologique ou physique de la professeure Verushka Lieutenant-Duval.
Yao Assogba rappelle toutefois que les étudiants ont aussi la liberté de donner leurs avis défavorable à l’emploi du mot en n.
On peut sans doute comprendre leur réaction par le fait que le mot nègre possède une histoire lourdement chargée, aussi bien en français qu’en anglais. C’est un substantif dont les morphèmes sont l’oppression et le mépris absolu subis par les peuples noirs : la discrimination, la ségrégation, l’exclusion profonde et « chosifiante », bref l’esclavage et la colonisation. Ces expressions péjoratives qui en découlent sont restées déshumanisantes d’hier à aujourd’hui et peut-être même demain : « plan de nègre », « travailler comme un nègre », « tête-de-nègre », « parler petit-nègre », etc.
Le sociologue souligne par ailleurs que si ce mot est synonyme de résistance, il rappelle aussi une ‘blessure collective’. Dans le cas qui nous intéresse ici, je dirais que le mot queer s’applique à la communauté LGBTQ sans distinction de race, de genre. Cependant, le mot nègre désigne une race, en l’occurrence la race noire, un substantif dont les morphèmes énumérés sont encore d’actualité.
L’évolution des valeurs s’exprime par une demande sociale de plus en plus grande pour le respect de la dignité humaine, dit-il.
Pendant longtemps, nos universités n’étaient pas dotées de comités d’éthique de la recherche. Mais depuis les années 1990, ces comités sont mis sur pied pour baliser la liberté de l’enseignement de faire la recherche afin de protéger le sujet humain. Peut-être que le moment est venu pour que nos universités se dotent aussi de comités d’éthique de l’enseignement pour baliser la liberté pédagogique. […]
Source :
Service des communications
UQO, 28 octobre 2020
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