Selon les études, la proportion de personnes autistes présentant une déficience intellectuelle varie de 13% à 84%. Autant dire qu'il n'existe pas de consensus sur cette question au sein de la communauté scientifique. «On tend de plus en plus à croire que les études surestiment la prévalence de la déficience intellectuelle, soit parce qu'on la mesure trop tôt dans le développement de l'enfant, soit parce qu'on n'utilise pas les bons outils pour évaluer les habiletés intellectuelles des personnes autistes», observe la professeure du Département de psychologie Isabelle Soulières.
En fait, on comprend de mieux en mieux qu'il existe une intelligence autistique reposant sur un fonctionnement cérébral distinct. «Des études cliniques couplées à l'imagerie cérébrale permettent de mieux saisir les processus à l'œuvre dans cette intelligence singulière, notamment la manière dont le cerveau raisonne et traite l'information», explique Isabelle Soulières, qui est titulaire depuis l'an dernier de la Chaire de recherche stratégique sur l'optimisation du potentiel cognitif des personnes autistes.
La chercheuse a cosigné avec Laurent Mottron, professeur au Département de psychiatrie de l'Université de Montréal, l'article «L'intelligence singulière des autistes», qui est paru dans le dernier numéro (mars 2019) du magazine français La Recherche.
Différentes formes d'autisme
On distingue dans le spectre autistique différentes formes, dont l'autisme syndromique, qui se caractérise par la présence d'une anomalie génétique qui s'ajoute à l'autisme, pouvant entraîner retard intellectuel, crises d'épilepsie et autres symptômes.
Dans leur article, Isabelle Soulières et Laurent Mottron s'intéressent à deux autres formes d'autisme dites prototypiques, non associées à une déficience intellectuelle, à une anomalie génétique ou à un trouble neurologique. La première, décrite dans les années 1940 par le pédopsychiatre américain Léo Kanner, caractérise des enfants qui, au-delà de leur désintérêt apparent pour leur entourage, présentent un retard important sur le plan du langage oral, mais une bonne mémoire verbale et musicale, tout en excellant dans des tâches requérant de manipuler mentalement des informations visuelles. «Ces enfants sont capables de se représenter l'espace, comme l'espace 3D dans les jeux vidéo. Ils pensent et raisonnent davantage avec des images qu'avec des mots et sont capables de retenir par cœur des horaires d'autobus, ou encore des textes lus ou entendus», observe la professeure.
Source :
Claude Gauvreau
UQAM, 28 mars 2019