Depuis plus de 100 ans, la maladie d'Alzheimer donne du fil à retordre aux chercheurs. «Des milliards de dollars ont été investis par les compagnies pharmaceutiques et les gouvernements dans la recherche, mais rien de concluant n'a émergé parce qu'on a du mal à identifier la maladie avec certitude», rapporte Marc-André Bédard, professeur au Département de psychologie. Le chercheur vient de publier ses résultats les plus récents dans la revue Molecular Psychiatry, qui appartient au prestigieux groupe Nature. Ceux-ci portent sur une nouvelle molécule pouvant servir de biomarqueur pour à la fois détecter précocement et quantifier la sévérité de la maladie d'Alzheimer, une première à l'échelle mondiale.

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Les recherches de Marc-André Bédard ont débuté il y a une quinzaine d'années en réaction aux difficultés inhérentes au diagnostic des différentes formes de démence, dont la maladie d'Alzheimer. Traditionnellement, on fait passer des tests psychométriques de mémoire, de langage et de concentration aux personnes que l’on croit être atteintes, explique celui qui est à la fois psychologue et pharmacologue. «Il faut plusieurs heures, voire même une ou deux journées pour caractériser les déficits observés et ainsi mieux identifier le type de démence dont il est question. Sauf que le taux de succès de cette approche est d'environ 80 %, ce qui n'est pas très fiable, surtout si on veut trouver des traitements pour la maladie. Comment tester efficacement des traitements si on n'est pas en mesure de diagnostiquer la maladie avec précision?»
L'impasse de l'amyloïde beta
Lorsque le Dr Alois Alzheimer a décrit la maladie pour la première fois, en 1906, il a noté la présence dans le cerveau de deux types de protéines : l'amyloïde beta et la protéine tau. «Au cours des 20 dernières années, les recherches se sont concentrées principalement sur l'amyloïde beta. On a ainsi découvert plusieurs biomarqueurs de cette protéine, explique Marc-André Bédard. Le problème, c'est que les sujets sains ont aussi de l’amyloïde beta dans le cerveau à partir de l'âge de 60-65 ans. Les biomarqueurs génèrent donc fréquemment des faux positifs.»
«Comment tester efficacement des traitements si on n'est pas en mesure de diagnostiquer la maladie avec précision?»
Marc-André Bédard
Professeur au Département de psychologie
L'autre problème avec l'amyloïde beta, c'est qu'elle est liée à un effet plafond. «Même si vous êtes subtilement atteint par la maladie d'Alzheimer, nous retrouverons une très grande quantité d'amyloïde beta dans votre cerveau. Cela implique qu'un traitement ne pourrait pas être correctement testé avec un biomarqueur de cette protéine, car l'effet plafond empêcherait de détecter s'il y a détérioration ou amélioration de votre condition.»
Source :
Pierre-Etienne Caza
Actualités UQAM, 12 septembre 2017