Les images sur la vidéo sont saisissantes : un homme, endormi dans un lit au Centre d'études avancées en médecine du sommeil de l'Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal, se met soudainement à frapper violemment dans le vide, puis sur le matelas et les montants du lit. « Lorsque nous rêvons durant la phase de sommeil paradoxal, notre corps est en état de paralysie musculaire. Or, certaines personnes perdent cette atonie et se mettent à bouger, à sauter, à crier – voire même à se battre, comme cet homme – pendant qu'elles rêvent. C'est ce que l'on nomme le trouble comportemental en sommeil paradoxal (TCSP) », explique Shady Rahayel, finissant au doctorat en psychologie sous la direction du professeur Jean-François Gagnon.
Au-delà des désagréments évidents (et des risques de blessures) pour le partenaire partageant le même lit, le TCSP doit être pris au sérieux. « Nous savons désormais que 90 % des patients qui présentent un TCSP vont développer la maladie de Parkinson ou la démence à corps de Lewy dans un horizon de 10 à 15 ans », précise Shady Rahayel.
Avec l'assistant en neuroimagerie Malo Gaubert, le jeune chercheur vient de cosigner un article sur l'état du cerveau de patients atteints de la maladie de Parkinson et présentant un TCSP dans la revue Sleep. Les doctorants David Rémillard-Pelchat et Pierre-Alexandre Bourgouin ainsi que le professeur Jean-François Gagnon figurent également parmi la douzaine de cosignataires. Le professeur Gagnon est un spécialiste de ce domaine. Il dirige le Research Laboratory on Brain, Aging and Cognition (BRAC) et est titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le déclin cognitif dans le vieillissement pathologique.
Les études antérieures
Shady Rahayel et Malo Gaubert ont étudié le cerveau de 71 sujets: 30 patients atteints de Parkinson, dont 15 présentant un TCSP, et 41 sujets en bonne santé. «Les patients atteints de la maladie de Parkinson qui ont aussi un TCSP ont une pathologie plus sévère, souligne Shady Rahayel. Leur pronostic n'est pas bon: leur état se détériore plus rapidement, ils ont plus de troubles cognitifs – certaines études avancent qu'ils présentent aussi davantage de troubles moteurs – et ils vivent moins longtemps.»
Dans les études antérieures sur l'état du cerveau de patients parkinsoniens, avec ou sans TCSP, le diagnostic du TCSP avait été établi sur la seule base d’un questionnaire soumis au patient. «Un véritable diagnostic requiert de passer une nuit de sommeil en observation à l'hôpital», souligne Shady Rahayel, qui a réalisé son étude à l'Hôpital du Sacré-Cœur, contribuant ainsi à bonifier la plus importante base de données au monde au sujet du TCSP. Ces études n'avaient pas utilisé non plus les technologies de pointe disponibles de nos jours en neuroimagerie. «Les chercheurs avaient uniquement mesuré le volume de matière grise dans le cerveau, indiquant que le lobe temporal, souvent associé à la mémoire – mais pas uniquement – était moins volumineux», précise-t-il.
Source :
Service des communications
UQAM, 23 avril 2019