2018-05-04
Vingt ans après son déploiement, la politique familiale québécoise est un modèle unique dont les effets sont tangibles tant d’un point de vue économique que sur la qualité de vie des parents et des enfants. Ce constat émane d’un colloque intitulé Le temps des bilans autour de la politique familiale, une initiative du partenariat de recherche Familles en mouvance, où se sont réunis des chercheuses et chercheurs, mais aussi de nombreux professionnels et intervenants issus du secteur communautaire comme du gouvernement québécois. Bien que chacun reconnaisse qu’il y ait toujours place à l’amélioration, les participants ont souligné que les efforts coordonnés autour de la politique familiale, intitulée Les enfants au cœur de nos choix, ont eu des effets largement positifs dans la population du Québec.
Le pari n’était pas gagné d’avance, a rappelé en ouverture du colloque madame Pauline Marois, ministre de la Famille au moment de l’adoption de la politique. Avant que l’idée d’une politique familiale parvienne à faire son chemin dans les préoccupations politiques, il a fallu déployer des efforts considérables. Trois mesures novatrices ont été mises de l’avant : des services de garde universels de qualité et à frais minimes pour les parents, un soutien financier aux parents par l’entremise de mesures fiscales et un régime d’assurance parentale permettant à tous les parents de se prévaloir de congés rémunérés à la suite de l’arrivée d’un enfant. Madame Marois insiste sur le fait que ces mesures ont suscité un engouement au-delà de toutes les attentes, ce qui démontre qu’elles répondaient à un important besoin des parents.
Dans son analyse rétrospective, Renée B. Dandurand de l’INRS souligne les contributions essentielles de nombreux groupes et organismes de la société civile et du milieu politique qui ont milité pour l’adoption de mesures sociales d’aide aux parents, pressant le gouvernement à doter le Québec de programmes efficaces en ce sens. Comme le note Claudette Pitre-Robin, directrice du Regroupement des centres de la petite enfance de la Montérégie, le gouvernement n’était pas devant une page blanche. Il s’est appuyé sur l’important réseau populaire de services de garde qui existait déjà en 1997 pour mettre en place le système actuel. Aussi, ajoute Marie-France Benoît, conseillère syndicale retraitée à la CSN, des pressions populaires et syndicales assidues ont été nécessaires pour obtenir en 2006 le feu vert du fédéral à l’instauration du Régime québécois d’assurance parentale (RQAP).
Des résultats probants
À mesure que prenaient forme les programmes, les données colligées montraient une tendance importante. La comparaison entre la situation des Québécois et des autres Canadiens permet de constater qu’à plusieurs égards les familles d’ici ont une meilleure qualité de vie. Peut-être en raison des mesures d’austérité, la différence s’est un peu amoindrie au cours des dernières années, mais l’effet de la politique familiale est néanmoins indéniable.
D’un point de vue économique, l’économiste Catherine Haeck de l’UQAM affirme que l’instauration des services de garde universels est un succès, car il a mené à une augmentation significative du nombre de mères occupant un emploi. La hausse de 12 points de pourcentage entre 1997 et 2002 n’a pas été observée chez nos voisins ontariens pour qui les services équivalents n’étaient pas disponibles.
Alain Noël, politicologue de l’Université de Montréal, a pour sa part démontré l’impact des mesures fiscales mises en place. Ces dernières, en permettant une redistribution financière aux parents, ont grandement amélioré la qualité de vie des parents comme des enfants. À partir de l’entrée en vigueur de la Prime au travail et du Soutien aux enfants en 2004, les enfants québécois vivent de moins en moins de pauvreté. Mieux encore, ils ont atteint au cours des dernières années, des taux de pauvreté inférieurs à la population générale. À titre comparatif, en Ontario depuis quelques années, les enfants sont maintenant plus susceptibles de vivre en situation de pauvreté que la moyenne de la population.