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Vincent Maire participe à une publication dans Science

Vincent Maire, professeur au Département des sciences de l'environnement de l'UQTR.

Chercheur spécialisé en écologie, le professeur en sciences de l’environnement Vincent Maire de l’UQTR a contribué à la publication récente d’un article dans la prestigieuse revue Science, portant sur la façon dont les écosystèmes réagissent lorsque l’environnement offre de moins en moins d’eau. Les résultats présentés dans l’étude – réalisée par le chercheur principal Miguel Berdugo et une dizaine d’auteurs –  apportent un éclairage nouveau sur la dynamique du fonctionnement des zones arides du globe, un sujet particulièrement important en cette ère de changements climatiques.

« Actuellement sur la planète, 45 % des terres émergées sont considérées comme arides. Ces zones sont habitées par plus de 2,5 milliards de personnes. Au fur et à mesure que l’eau disponible vient à manquer, comment l’adaptation des communautés vivantes et la régulation du fonctionnement de l’écosystème se déroulent-elles? Auparavant, les scientifiques croyaient que ces processus se faisaient de façon progressive. L’étude démontre plutôt qu’il existe trois points de changement abrupt, appelés points de basculement. Ce constat remet en cause les fondements théoriques précédents et permettra de mieux prédire l’évolution spatiale et temporelle de la situation dans les zones arides », d’expliquer le professeur Maire.

Une vaste recherche

Pour réaliser cette étude, de nombreuses données concernant les différents écosystèmes arides de la Terre ont été regroupées. Une vingtaine de caractéristiques ont été considérées : texture du sol, variabilité des précipitations et du climat, couverture et richesse végétale, communautés microbiennes et carbone organique du sol, interactions plantes-sol et plantes-plantes, etc. Ces variables constituent des indicateurs importants du fonctionnement des écosystèmes.

« Pour ma part, j’ai fourni plus particulièrement une base de données sur les caractéristiques des feuilles de plantes à l’échelle mondiale. J’ai aussi contribué à l’analyse et à l’interprétation de l’adaptation fonctionnelle des communautés végétales au gradient environnemental d’aridité », mentionne Vincent Maire.

Des seuils critiques déterminants

Grâce à l’étude, les trois points de basculement de l’état des écosystèmes ont pu être très clairement identifiés sur l’échelle de variation du taux d’aridité de l’environnement.

Au départ, une terre est qualifiée d’aride lorsque les précipitations ne compensent que 65 % de la perte d’humidité par évapotranspiration dans l’atmosphère. Le déficit d’eau se chiffre alors à 35 %. À cette étape, les plantes maintiennent un taux élevé de photosynthèse foliaire malgré le manque d’eau, grâce à des tissus plus denses et des teneurs plus concentrées en nutriments.

Lorsque le déficit d’eau atteint 54 %, un premier point de basculement survient. Cette phase de perturbation abrupte entraîne des changements chez plusieurs variables de l’écosystème. De nouvelles espèces végétales apparaissent, mieux adaptées à la sécheresse mais plus exigeantes envers les ressources du sol. Ces bouleversements modifient les communautés microbiennes du sol et diminuent les stocks de matières organiques sous terre.

Le second basculement survient à 69 % de déficit d’eau. Passé ce point, la diversité et la couverture générale des plantes diminuent fortement. La raréfaction de la végétation rend la couleur du sol plus claire, ce qui entraîne une plus grande réflexion de la lumière vers l’atmosphère. Cette énergie perdue ne peut plus être utilisée par les plantes. Ce seuil se caractérise aussi par une augmentation de l’abondance de champignons à l’origine de maladies chez les animaux.

Le dernier point de basculement apparaît avec un déficit d’eau à 83 %. Les quelques espèces de plantes en présence demeurent sous forme de graines tant qu’il n’y a pas de pluie et poussent sur de courtes périodes. À cette étape, un écosystème décline irrémédiablement vers un état totalement désertique.

« Grâce à cette étude, nous savons maintenant qu’à l’approche d’un point de changement abrupt dans l’écosystème, il suffit d’une toute petite augmentation du déficit en eau pour que survienne un grand bouleversement », note le professeur Maire.

Une avancée scientifique majeure

L’article paru dans Science rapporte que d’ici 2100, plus de 20 % de la surface terrestre traversera un ou plusieurs de ces seuils critiques de basculement.

« Les résultats de l’étude permettent de mieux se projeter dans l’espace et le temps. Les endroits arides sur le point de basculer dans un fonctionnement d’écosystème complètement différent ont été ciblés sur une carte du globe. Nous pouvons maintenant mieux anticiper l’avenir de ces territoires et les impacts potentiels sur les populations », rapporte M. Maire.

Ce nouvel apport scientifique – qui n’aurait pu être obtenu sans la collaboration de plusieurs chercheurs –  est susceptible d’intéresser fortement les groupes d’experts sur le climat et tous les intervenants soucieux des répercussions de changements dans les écosystèmes.

« Cette étude nous a également permis de définir des indicateurs précoces de changement. Nous pourrons ainsi mieux détecter les endroits sur la planète qui s’approchent de ce changement et, éventuellement, nous saurons qu’il est urgent de prendre des mesures fortes pour limiter la perte en eau des écosystèmes touchés », signale Vincent Maire.

Notons que l’étude publiée dans Science, sous le titre Global ecosystem thresholds driven by aridity, a été rendue possible grâce au financement de l’Union européenne. Pour sa part, le professeur Maire a bénéficié de l’appui financier du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CSRNG) du Canada ainsi que du Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies (FRQNT).

Source :
Service des communications
UQTR, 17 février 2020

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